Tunisie Réveille Toi ! http://www.reveiltunisien.org/ Site d'information et d'opinion sur la Tunisie fr SPIP - www.spip.net Une mémoire de l'identité http://www.reveiltunisien.org/spip.php?article342 http://www.reveiltunisien.org/spip.php?article342 2003-01-01T15:23:21Z text/html fr Kamel Mahdhaoui Bien que non pratiquants de la religion, transgressant allègrement certaines obligations de l'Islam et ayant des habitudes assez éloignées des normes les plus rigoureuses, beaucoup de tunisiens, se sentent, fermement, une identité musulmane. Beaucoup de personnes se culpabilisent vis à vis de la religion et en arrivent à la rejeter ou la projeter, comme si nier violemment cet Islam les soulageaient, tant l'acceptation de la religion et du mode de vie actuel peuvent paraître contradictoires. (...) - <a href="http://www.reveiltunisien.org/spip.php?rubrique41" rel="directory">Société</a> <div class='rss_texte'><p>Bien que non pratiquants de la religion, transgressant allègrement certaines obligations de l'Islam et ayant des habitudes assez éloignées des normes les plus rigoureuses, beaucoup de tunisiens, se sentent, fermement, une identité musulmane.</p> <p>Beaucoup de personnes se culpabilisent vis à vis de la religion et en arrivent à la rejeter ou la projeter, comme si nier violemment cet Islam les soulageaient, tant l'acceptation de la religion et du mode de vie actuel peuvent paraître contradictoires.</p> <p>Est-il possible de vivre de façon épanouie, de produire, de se développer et de s'élever en vivant cette culpabilité et ces contradictions ? Difficilement.</p> <p>J'en profite pour appeler à ce que l'Islam, via ses intellectuels, puisse renvoyer un message de compréhension et d'humanisme envers leurs peuples en digérant avant quiconque ses contradictions en interprètant le Coran dans un sens rassurant qui n'obligerais pas l'individu à le refuser d'un bloc.</p> <p>En Tunisie, cette culpabilité s'ajoute à celle qui vient de la peur due au vide démocratique, à la prédominance de l'arbitraire et au non fonctionnement des institutions de régulation.</p> <p>L'humiliation de la dictature, répétée, de jour en jour, culpabilise l'individu qui a su accepter progressivement sa honte, laisser ses droits au bon vouloir de l'arbitraire.</p> <p>Le reniement sera assumé jusqu'à la délation qui n'est qu'une tentative mentale et inconsciente de se déculpabiliser en précipitant les autres dans le spectre des violeurs.</p> <p>C'est la même chose concernant l'autocensure qu'on appellera plutôt la fausse intelligence de la peur car cette auto-censure ne fera qu'amplifier la peur et la culpabilité et donc la délation comme perversion de la perversion.</p> <p>Le résultat de tout ce qui vient d'être dit est le contorsionnement extraordinaire que va devoir faire le Tunisien pour accepter la réalité pénible. Son identité se trouve ainsi sous haute pression même si la fuite dans la consommation peut adoucir la chose.</p> <p>De quelle identité allons-nous donc parler dans ce contexte qui a un peu disloqué les repères ?</p> <p>L'introspection est forcément subjective : On étudie ses propres composantes culturelles enfouies dans la mémoire des siècles avec un outillage qui est lui-même l'objet de la recherche. Le sujet et l'objet sont une seule chose et la déroute du mental est à l'affût.</p> <p>La tentative naturelle pour mieux cerner cette identité est la réduction de l'identité à certains aspects. On est amené consciemment ou pas à simplifier la question et n'en voir qu'une partie.</p> <p>Le résultat de la simplification est plus digeste.</p> <p>Profitons pour remarquer l'aptitude, de cette simplification, à motiver la société ce qui n'a jamais échappé au politique qui s'en empare pour faire mouvoir et parfois faire avancer le collectif. Il le fait en réveillant de façon déséquilibrée une des composantes identitaires. Il le fait pour deux raisons.</p> <p>Premièrement, sans déséquilibre, aucun mouvement n'est possible. Le déséquilibre de l'identité est un moteur mental et sociétal puissant et de fond.</p> <p>Deuxièmement, le déséquilibre est simplificateur et il fait monter l'identité à la surface des esprits. La collectivité prend conscience d'elle-même.</p> <p>La difficulté du discours peut venir aussi du fait que l'identité est une idée dont l'échelle de temps se compte en siècles alors que les esprits qui contiennent cette idée sont des individus dont l'existence se chiffre en dizaines d'années.</p> <p>Les hommes, support physique de leur culture, sont capables de mesurer la signification et la complexité de cette identité qui vit dans leurs esprits de deux manières : une manière consciente et une manière intuitive.</p> <p>Lorsqu'un danger guette une collectivité, souvent cette dernière initie, naturellement, des mouvements de transformation en occultant une partie d'elle-même. La simplification prend la forme de repli et a pour but de se rassurer dans la continuité du temps et des siècles.</p> <p>Les individus reconnaissent instinctivement la dimension du temps de leur identité et le pouvoir rassurant et protecteur de cette identité perçue.</p> <p>Son caractère irrationnel et viscéral, son resserrement, sa réduction polymorphe, l'expansion d'une de ses facettes, sont également reconnus par les autres collectivités humaines comme étant un potentiel de défense ou d'agression redoutable et à redouter.</p> <p>Au passage remarquons que la sagesse voudrait que les humains (tous) doivent être conscients que d'une part, il n'est pas possible de vivre ou se développer comme une menace envers les autres peuples et que d'autre part, il n'est pas possible d'exister sans défendre sa culture ou son identité.</p> <p>Revenons à nos Arabes musulmans. Lorsqu'ils envahirent la Tunisie à partir du 7ième siècle, trouvèrent-ils une dure et âpre résistance, témoignage d'une identité et d'une culture bien ancrée chez nos ancêtres. Il a fallu des siècles pour que nous arrivions à intégrer l'identité des envahisseurs dans la précédente.</p> <p>L'identité arabo-musulmane fut tellement bien intégrée qu'elle est devenue prédominante, au moins pour ce qui est visible, jusqu'à aujourd'hui.</p> <p>Les aspects pré-islamiques de l'identité se trouvaient refoulés vers l'inconscient collectif tandis qu'à la surface, les grands-parents surenchérissaient d'origines arabes fantasmagoriques et de filiations musulmanes saintes souvent inventées.</p> <p>Aujourd'hui, si l'identité arabo-musulmane visible devait disparaître ou devait être refoulée vers l'inconscient collectif, cela se ferait, peut être, sur des siècles. Beaucoup d'erreurs politiques viennent de l'échelle de temps. Le danger extrême étant une rupture dans la chaîne des générations porteuses de l'identité.</p> <p>Comme on l'a déjà dit, il n'est pas forcément souhaitable d'effriter sciemment les composantes défensives de cette identité car elle est une limite que le peuple tunisien reconnaît instinctivement dans la continuité des siècles : La limite du pouvoir, comme le dit un inconnu célèbre, sont peut être les bornes de la foi, notamment les croyances profondes identitaires.</p> <p>Aujourd'hui, tout excès démonstratif pour cette composante arabo-musulmane se traduit par une réaction envers sa dissolution. Elle se manifeste, d'un coté, par des éléments condamnables tels que la répression sauvage et d'autres part, des aspects « positifs » dont la libération de la femme, le statut personnel et autres.</p> <p>Tout excès d'œuvres répressives, de torture ou de modernissisme mal séant se traduisent par une sympathie envers la composante arabo-musulmane ou islamique prédominante dans les consciences.</p> <p>L'identité tunisienne est complexe. Rappelons d'autres composantes conscientes, en plus des composantes refoulées, liées au bassin méditerranéen ou à la région du Maghreb.</p> <p>On peut décliner des aspects ethniques, linguistiques réels et culture réelle, linguistiques théoriques, … leurs évolutions et leurs liens et influences avec l'identité tunisienne, maghrébine, berbère, saharienne, africaine, arabe, arabo_musulmane, islamique...</p> <p>Remarquons pour finir, que, en Tunisie, cette identité protectrice nous a toujours valu la protection des puissances étrangères et que les Tunisiens, autochtones, ont souvent été incapables, depuis toujours, de déjouer les appétits.</p> <p>Non seulement ils ne savent pas les déjouer mais ils les appellent comme un palliatif de leur incapacité à s'organiser en une société qui accepte sa diversité culturelle, une société qui refuse de réduire son identité à un siècle ou un autre et une société plus mature que celle des liens familiaux.</p> <p>L'histoire a peut être imprimé dans l'identité tunisienne une teinte défensive par l'évitement des oppresseurs et développé une aptitude à des profils bas.</p> <p>Si c'est le cas, disons que le réveil devra se faire dans la concertation, en bonne intelligence et avec le refus déterminé de la violence de la part de ceux qui en ont les moyens ou qui en auront l'aptitude.</p> <p>Nous devons opérer les changements nécessaires à désamorcer la fuite en avant et ne pas céder à résoudre les questions dans ce qu'on croit être le rapport de force du moment car ce qu'on croit être la réalité est pour beaucoup le fruit du zèle et de la flatterie.</p> <p>Nous devons nous accepter et nous ne devons pas exorciser la peur des uns et des autres dans le martyr ou la torture de nos enfants, quelqu'en soit la raison. Il n y a pas d'autres buts au delà de l'intégrité mentale, physique et culturelle de nos enfants dans un monde en paix.</p></div>